Pourquoi avez-vous choisi de travailler sur les voyages à l’étranger de François Mitterrand entre 1971 et 1981 ?
J’ai travaillé en Master 1 sur les socialistes français et Cuba. J’étais intéressée par l’image que la révolution cubaine avait laissée dans la gauche française et je me suis aperçue qu’il existait très peu de choses sur la politique internationale du PS dans ces années-là. Ce sujet, énorme à traiter au vu du nombre de pays envisagés et des sources à analyser, est devenu depuis mon sujet de thèse. Mais pour mon mémoire de Master 2 j’ai dû restreindre mon objet. Plutôt que de faire une étude classique des discours, j’ai décidé de partir d’un objet concret, les voyages du Premier secrétaire. J’avais en effet fait l’hypothèse qu’ils formaient la partie émergée, médiatique de la diplomatie du PS. Cela s’inscrit dans le renouveau de l’histoire internationale par l’approche transnationale, où l’on s’intéresse de plus en plus aux circulations concrètes. De plus, ma directrice de recherches, Sophie Coeuré, travaille sur les voyages, donc c’était logique de partir sur ce sujet.
Quelles sources avez-vous utilisées ?
Comme il n’existe pas de liste des voyages de François Mitterrand à l’étranger dans les cartons du PS, je suis partie des index du journal Le Monde, conservés à la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine. Puis les archives du Parti socialiste conservés à la Fondation Jean Jaurès, et notamment les fonds internationaux relatifs aux pays dans lesquels s’est rendu François Mitterrand, ont formé l’essentiel de mes sources, tout comme la presse et les publications du Parti. J’ai également pris appui sur de nombreux ouvrages biographiques de socialistes et fait de l’histoire orale : j’ai interviewé Claude Estier, Didier Motchane, ainsi qu’Alain Chenal, alors responsable Proche-Orient au PS. J’ai enfin complété mon étude avec les archives télévisuelles de l’INA : dans les années 1970 la télévision est un média populaire, je suis donc allée voir quels voyages y étaient relayés.
Etes-vous allée consulter les archives des partis étrangers ?
C’était impossible physiquement : entre 1971 et 1981, François Mitterrand se rend dans trente-huit pays différents. C’est vrai qu’il serait intéressant d’avoir parfois des correspondances plus complètes. Mais les archives françaises du Parti socialiste, dans le domaine international en tous cas, sont déjà très riches. Et surtout, l’originalité de la problématique de mon étude, c’est ne pas étudier seulement des relations bilatérales, mais la vision du monde du PS. J’essaie de voir comment un parti internationaliste appréhende l’évolution mondiale dans les années 1970.