Il est frappant de constater à quel point François Mitterrand redevient dans les débats sur l’Europe, une référence y compris pour ceux, à gauche, qui avaient cru opportun ces dernières années de se démarquer de lui ou de feindre l’oubli. Frappant mais pas surprenant.
Sa vision d’une France forte dans une Europe forte, sa persévérance, ses audaces, la force de qui apparaît avec le recul comme un « triangle magique » Mitterrand, Kohl, Delors, son habileté multiforme, sa force d’entraînement, tout cela ne (...)
Les lois de 1982, en transférant des pouvoirs, des compétences et des moyens, ont irrigué et revitalisé notre démocratie comme elle ne l’avait jamais été. En se fondant sur l’expérience qu’elles avaient permis d’acquérir, à tous les niveaux, il était utile et nécessaire de les approfondir dans une deuxième grande étape, pour une véritable démocratie territoriale. Au lieu de cela, aujourd’hui, le Gouvernement trahit, dans l’esprit et dans les faits, le grand mouvement lancé il y a un peu plus de vingt ans.
La (...)
Il en est curieusement ainsi de certains évènements majeurs de notre Histoire de ne pas faire vibrer principalement l’opinion publique. Il est vrai qu’à partir de 1981 les regards et les aspirations se portaient souvent ailleurs et partout : il y avait en effet tant à faire dans le même temps pour renouer un lien social fragilisé ou redéployer une économie en difficulté. S’agissant de la décentralisation, il s’agissait de nos responsabilités, tout simplement, des responsabilités à répartir entre les (...)
Lire la suitePhilippe Foussier : Avant que la gauche n’arrive aux responsabilités, quelle a été la genèse, la réflexion, et de Mitterrand et du Parti socialiste sur les questions de décentralisation pour aboutir aux lois Defferre ?
Michel Charasse : La réflexion sur la décentralisation a commencé bien avant 1981 et ceux qui ont sensibilisé le Parti socialiste à ce sujet sont François Mitterrand et Gaston Defferre rejoints ensuite par Pierre Mauroy. Le Parti socialiste était plutôt jacobin, il était vraiment (...)
Elu conseiller général de la Charente-Maritime en 1976, je rejoins aussitôt la commission des finances de cette assemblée. Aux yeux de tous, cette commission a du prestige dans la mesure où elle examine l’ensemble des dossiers. Mais dès les premières séances, j’y découvre tout le poids de la tutelle incarnée par le préfet. Le représentant du pouvoir central est omniprésent, maître du budget, seul chargé de son exécution et fort du monopole de l’étude et de l’expertise des projets par ses propres services. (...)
Lire la suiteCentralisation, décentralisation, deux versants d’une affaire profondément française. Nul par ailleurs en Europe, la question n’a été si âprement débattue. Et à chaque fois avec le sentiment qu’on touchait là à quelque chose d’absolument essentiel, aux mystères mêmes de notre architecture. A beaucoup la pérennité de la France, sa puissance, sa vivacité, semblaient être liées de façon inséparable au système strictement centralisé dans lequel nous avons vécu le plus long temps de notre Histoire.
1982 allait (...)
Lors des élections de 1981, François Mitterrand avait beaucoup insisté auprès des élus locaux pour qu’ils se préparent à discuter de nouvelles lois concernant l’administration de la République. Cela faisait partie des grands projets de son septennat. Ce qui aurait pu n’être qu’une réforme parmi tant d’autres s’est révélé être, au final, une véritable révolution.
Le système napoléonien, confirmé par la Troisième République, faisait des préfets, ce que certains ont osé appeler, des "gardes-chiourmes" de la (...)
Vertu de la victoire du 10 mai 1981, volonté d’agir après avoir été longtemps éloignés du pouvoir, soif de faire du Parlement le coeur de la démocratie Française ? Il y avait sans doute de tout cela chez les députés de la « vague rose ».
Pendant les mois de juillet-août 1981, de très longues nuits et journées furent consacrées à l’examen des lois Deferre. Une formidable solidarité entre les députés de gauche imprégnait le déroulement des travaux. La bataille des amendements avait commencé à la Commission des (...)
L’idée de décentralisation est pour moi liée à un échange courtois, mais vigoureux entre Pierre Mauroy et François Mitterrand, lors d’un comité directeur du Parti Socialiste préparant le programme des élections municipales de 1977.
Le maire de Lille se faisait le porte-parole d’une France urbaine et d’espaces où la densité démographique est forte. Prudemment favorable à la fusion des communes, mais n’osant pas revendiquer cette position, il plaidait avec fougue en faveur de leur regroupement et de la mise (...)
Menées au pas de charge par Gaston Defferre, les réformes décentralisatrices des années 1982 et 1983 n’ont pas pris au dépourvu les sénateurs socialistes qui avaient eu l’occasion, pendant l’année précédente, de se « faire les dents » avec un projet de loi du gouvernement Barre, portant développement des responsabilités des collectivités locales.
Les batailles d’amendements menées alors face au ministre de l’Intérieur, Monsieur Bonnet, avaient été précédées de longues séances de travail avec nos collègues (...)
Les lois de décentralisation de 1982-83, votées par le gouvernement Pierre Mauroy, portent l’empreinte de François Mitterrand.
Pour avoir eu l’honneur de siéger à ses côtés, c’est à dire côte à côte, au Conseil Général de la Nièvre pendant plus de 8 ans, je peux témoigner de son agacement au moment du budget, voté par nous, confisqué ensuite par le Préfet. Le Préfet rédigeait les rapports et orientait ainsi la politique départementale. On pouvait, certes, les refuser, mais suivait un autre rapport, toujours (...)
Mais le gouvernement d’alors a choisi une solution plus ambitieuse consistant à engager une réforme statutaire couvrant l’ensemble des agents de l’Etat, des collectivités locales et des établissements publics hospitaliers.
C’est ce qu’on a appelé alors un statut général « à trois versants » qui a placé sous un même ensemble de droits et d’obligations près de cinq millions d’agents publics tout en respectant la diversité des fonctions publiques et en préservant notamment le principe d’autonomie de gestion des (...)
L’amnésie semble être un des traits caractéristiques de notre époque. C’est ainsi que la droite, en reprenant en mains l’essentiel des pouvoirs, tente aujourd’hui, avec la décentralisation, de faire sien un héritage qui ne lui appartient pas.
Aujourd’hui, qui, parmi les plus libéraux, oserait se dire opposé au mouvement décentralisateur, au juste exercice de la démocratie locale par les citoyens et leurs représentants locaux ? Qui, dans le camp conservateur, oserait montrer du doigt l’essor de (...)
J.F. Huchet : A partir du terme « décentralisation » il a été théorisé des projets très sensiblement différents selon les époques. Quelle définition en donnez-vous ?
M-P Daubresse : Pour moi, il s’agit de diffuser le maximum de responsabilités vers les régions, les départements ou les communes en l’accompagnant d’un mouvement de déconcentration des services de l’Etat. J.F. H : En quoi les résultats obtenus au terme d’un tel processus favoriseront-ils l’exercice de la citoyenneté ? M-P Daubresse : Le problème (...)