François Mitterrand et l’Afrique : nous avons pensé à « La Lettre » que ce sujet méritait un dossier. En effet, les événements de Côte d’Ivoire, après d’autres, ravivent les interrogations sur le principe même d’une politique de la France en Afrique. En même temps l’idée d’une vraie politique africaine de l’Europe, relais espéré par certains, apparaît elle aussi comme problématique, mise à part l’aide au développement.
Dès qu’il l’a découverte en 1950, François Mitterrand a vraiment aimé l’Afrique. Elle a été (...)
En mars 1986, Marguerite Duras force la porte de l’Élysée. Elle souhaite rencontrer le Président. Celui-ci accepte ; il connaît l’écrivain depuis la guerre.
De cette rencontre va naître une série d’entretiens très riches au cours desquels les questions les plus diverses sont abordées et où François Mitterrand répond avec beaucoup de naturel et de décontraction. Au détour d’une question, il dit son amour pour l’Afrique :
« [L’Afrique noire] était, à l’époque, au lendemain de la guerre, très éloignée de (...)
« À quatre kilomètres l’une de l’autre, Brazzaville et Léopoldville amassent aujourd’hui d’incalculables réserves d’énergie, rabotent des pistes d’aviation capables de supporter les monstres mécaniques de la surpuissance, creusent des bassins de radoub, cimentent des quais, lancent des voies ferrées et des routes concurrentes d’accès vers la mer, Accra et Abidjan s’envient obscurément et s’échauffent à l’idée grandiose d’une Fédération de l’Ouest dont chacune serait l’unique capitale.
Au Togo, coupé en deux, (...)
J’étais un fonctionnaire de l’État français, fort jeune, qui a eu la chance de participer, à son modeste niveau, au sein du cabinet du ministre de la France d’outre-mer, aux initiatives de François Mitterrand dont l’influence a été déterminante sur le cours des relations francoafricaines, et qui voudrait faire partager l’admiration et le respect que lui ont inspiré la clairvoyance exceptionnelle et le rare courage politique de l’homme, alors à l’aube de son grand destin dont on honore aujourd’hui la (...)
Lire la suite« Car garder l’Afrique, et y rester, n’était-ce pas d’abord en confier le soin aux Africains qui sauraient fermer les yeux devant les mirages d’un nationalisme illusoire ? N’était-ce pas leur conférer à cette fin les droits politiques, économiques, sociaux qu’hommes libres ils pouvaient justement exiger ? N’était-ce pas leur proposer l’entrée à égalité dans une communauté plus vaste et plus forte où la France continuerait d’être leur amie et leur guide ? Et perdre l’Afrique n’était-ce pas agir comme si (...)
Lire la suiteDès avant la fin du second conflit mondial, la France a entrepris une série de réformes dans ses colonies d’Afrique au sud du Sahara, inaugurée par la conférence de Brazzaville, en vue de faire face à la nouvelle donne politique sur l’échiquier mondial et dans son propre empire colonial.
Ces précautions n’ont pas permis de contenir la dynamique du mouvement nationaliste. Certes les situations ont été fort diverses, d’un territoire à l’autre, mais les organisations et les hommes qui ont conduit le combat (...)
Vous prenez la direction de la cellule africaine de l’Élysée au lendemain de la victoire de François Mitterrand à l’élection présidentielle de 1981. Comment cette victoire est-elle perçue en Afrique ?
Guy Penne. - À cette époque le mur de Berlin étant toujours là, le monde était divisé entre les « progressistes » et les autres, avec toutes sortes de nuances. En Afrique, si la télévision n’était pas très développée, les radios alimentaient sans répit les transistors. Toutes ont fait écho au choc que cet (...)
Vous connaissiez déjà bien l’Afrique, où vous aviez longtemps exercé votre métier de journaliste, lorsque vous rejoignez Guy Penne qui venait d’être nommé à la tête de la cellule en charge des relations avec les pays de ce continent.
Jean-Christophe Mitterrand. - Rien n’était écrit ni prévu. Il s’est trouvé que dans un premier temps, en 1981, j’ai pu aider Guy Penne à reconstituer le fonds documentaire indispensable sur ces questions, fonds documentaire qui n’existait plus quand il a pris ses fonctions. Le (...)
Lorsque l’on évoque, aujourd’hui, la politique africaine de François Mitterrand, il n’est pas rare que l’on néglige l’une des premières grandes affaires du septennat, c’est-à-dire l’interposition - l’engagement ? - de l’armée française entre les troupes libyennes et tchadiennes. Pourtant, la question du Tchad a longtemps mobilisé notre diplomatie et notre armée. Vous-même avez joué un certain rôle dans cette affaire.
Roland Dumas. - C’est tout à fait exact. J’ai même eu à m’occuper du Tchad avant d’être nommé (...)
François Mitterrand avait avec l’Afrique une longue connivence. Ministre de la France d’outre-mer en 1950, il avait tissé des liens politiques personnels avec les principaux dirigeants d’Afrique francophone au sud de Sahara.
Il avait réussi à détacher un des principaux rassemblements politiques africains, le RDA, de l’apparentement avec le Parti communiste et avait conclu un accord entre la formation africaine et l’UDSR. Au cours de sa longue carrière ministérielle sous la IVe République, il avait (...)
Mai 1981 sonne en France le coup d’envoi annoncé pour des politiques de rupture, dans l’Hexagone, bien sûr, mais également dans la conduite des affaires extérieures de la France. Pourtant, très vite, concernant le domaine très particulier de la politique africaine de la France, les impulsions initiées par le ministre de la Coopération, Jean-Pierre Cot, se heurtent aux vues du président de la République François Mitterrand et ce, jusqu’au divorce au bout de dixhuit mois. Comment l’expliquez-vous ?
Erik (...)
Peu d’hommes politiques auront marqué l’évolution de l’Afrique contemporaine autant que François Mitterrand. Son discours de La Baule, en juin 1990, à l’ouverture du XVIe sommet franco-africain, a véritablement entamé une ère nouvelle sur le continent noir : il a sonné le glas des régimes de parti unique qui y étaient le plus répandu, et permis d’y instaurer le multipartisme et la liberté de la presse. Presque partout, cette ouverture démocratique - si limitée qu’elle soit parfois - a survécu aux conflits (...)
Lire la suiteFrançois Mitterrand aimait l’Afrique. Parce que dans sa carrière ministérielle sous la IVe République il l’avait parcourue, et qu’il connaissait intimement tous les dirigeants qui allaient conduire ses premiers pas lors de l’indépendance.
Parce qu’il l’aimait et la connaissait en profondeur, dans ses entrailles culturelles, ethniques, historiques, il savait deux choses qu’il rappelait constamment à ses collaborateurs : il faut respecter l’Afrique. Toute démarche qui consistait à y projeter nos parti (...)
L’action politique de François Mitterrand restera marquée dans la durée par cette attention particulière qu’il a toujours portée aux pays du Sud et, dans ce contexte, par son attachement à l’Afrique. Sans nul doute, son passage au ministère de la France d’outre-mer au tout début des années cinquante a été pour lui un moment fort. C’est de cette époque que datent mes premiers souvenirs de jeune Sénégalais, accueillant comme bien d’autres dans les rues de Saint-Louis ce séduisant ministre. J’ai toujours vu par (...)
Lire la suiteNous venons de perdre il y a quelques mois un être exceptionnel et admirable, un ami irremplaçable, un grand scientifique, un grand serviteur de l’État, en bref l’une des trop rares personnalités qui nous rendent fiers d’être français.
D’autres que moi ont retracé dans leurs éloges les principales étapes d’une vie particulièrement brillante et bien remplie : normalien, universitaire, physicien en cristallographie, responsable des organismes de recherche français les plus importants, « père » de la fusée (...)